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6 novembre 2007 2 06 /11 /novembre /2007 14:18

Vous allez me dire que je me manque d'esprit critique et que je n'évoque jamais les sujets qui fâchent. Alors aujourd'hui pour ce faire, je vous propose un petit jeu : j'ignore qui lit mon blog donc je vais écrire mon message de façon détournée.


Quand on pense à la Chine, on pense souvent à la C... = mot de 7 lettres signifiant « examen d'une autorité décidant de ce qui peut être publié ou diffusé ». Est-ce que j'en ressens les effets ? De façon indirecte, oui. De quelle manière ? Par exemple, lorsque je surfe sur internet à la recherche d'informations pour préparer mes cours, je me suis rendue compte que certains sites étaient inaccessibles. Au début, je n'y prêtais pas attention car, après tout, il n'est pas rare que les liens ne fonctionnent pas tous correctement ou que certains sites aient disparu. Cependant, lorsque j'ai tenté plusieurs fois d'accéder à l'encyclopédie libre W.... , j'ai vu que cela m'était impossible. Ce n'est qu'à partir de ce moment-là que j'ai compris qu'il faisait partie des sites C... à l'instar d'un certain nombre d'autres. Le problème lorsque je souhaite accéder à une adresse que je ne peux ouvrir, c'est que j'ignore si c'est lié à la C... ou simplement parce que le site n'existe plus, le message d'erreur étant identique dans les deux cas.... Je suis d'autant plus surprise que les informations que je recherche sont anodines : elles concernent uniquement mes cours, c'est-à-dire grammaire, civilisation... Par contre, c'est clair qu'il y a de la C..., notamment lorsque les recherches portent sur des sujets problématiques : j'ai fait le test. J'ai tapé dans un moteur de recherche le mot F.... = mot en 9 lettres, mot chinois qui désigne une sorte d'organisation considérée comme subversive, pour rester dans le vague. Et là, c'était le ponpon : impossible d'afficher ne serait-ce que la page des résultats. Pour les autres, lorsque je tape T... ou T...  (noms de deux pays proches dont on ne sait pas exactement à qui ils appartiennent ... ou pas), un certain nombre de résultats s'affichent mais la moitié des liens au moins ne s'ouvrent pas ici. Avec le mot F..., c'est pire : la page des résultats elle-même est inaccessible « Impossible d'afficher la page » me dit mon moteur de recherche comme si j'avais un problème de connexion internet; ce qui n'est pas le cas.


Quand on pense à la Chine, on pense à la P.... = mot de 10 lettres dont le sens est « action qui a pour but de propager certaines opinions, doctrines... ». Sincèrement, je ne la ressens pas dans ma vie quotidienne d'autant plus que je ne regarde pas la télévision et que je ne lis pas les journaux (j'ai une bonne excuse : je serais bien incapable de les lire !). Donc, dans quelle mesure, la P... influence-t-elle la vie des Chinois ? J'ai du mal à répondre à cette question. Ce que je peux dire à mon niveau, c'est-à-dire ce que j'ai pu observer dans les productions de mes étudiants, c'est qu'ils n'ont pas de connaissances très poussées sur le monde en général et les litiges politiques actuels qui ont lieu dans certains pays voisins. Je pense notamment à l'exemple de la B..... Mes étudiants ignoraient totalement ce qui se passait là-bas, aucun d'entre eux n'avait entendu parler d'A.S.S.K (femme très célèbre) et, évidemment, pas un ne savait que leur pays soutenait les dirigeants au pouvoir. De même, tous mes étudiants trouvent normal que T... (vous savez, la petite île au large des côtes chinoises) revienne dans le giron national. Ainsi, pour expliquer le mot « reprendre » dans la phrase « L'Allemagne a repris l'Alsace et la Lorraine à la France » (c'était un exposé sur les guerres), l'étudiante a donné un exemple : c'est comme nous, la Chine veut reprendre T.... Et là, tous mes étudiants ont acquiescé, cette illustration leur parlait. Je ne dis pas que c'est bien ou pas bien de le penser, je veux juste vous faire comprendre que mes étudiants n'ont pas de recul ou d'esprit critique. Pour eux, c'est normal car cette île est chinoise, point final. Ils sont incapables d'avancer un argument. C'est d'ailleurs la même chose pour la question du T... (pays montagneux dont le représentant a récemment été reçu par le chef de l'Etat des Etats-Unis). De toute façon, sachant que les étudiants ont des cours de politique durant une grande partie de leur scolarité et même pour passer leurs examens de master, il est indéniable qu'il y a bien de la P... à un moment donné ou un autre....


Quant aux problémes de la P... de M.. = le fait de recourir à une punition plus expéditive que la prison à vie, je vous ai déjà cité l'exemple d'une de mes étudiantes qui déclarait que « le coupable sera condamné à mort, évidemment ». Cette phrase n'a pas besoin d'être commentée...


Sinon, la question des D... de l'H...., un de mes élèves m'a fait un long discours pour me démontrer qu'à l'heure actuelle, les préoccupations de la Chine sont surtout d'ordre économique et que le reste n'est que bagatelle pour l'instant. Selon lui, la Chine doit surtout se concentrer sur l'aspect économique et donner du travail à tous les Chinois, les rendre plus riches... bref devenir une grande puissance économique (qu'elle est déjà); alors les thèmes de l'environnement, des D... de l'H... à côté, ne comptent guère car ce ne sont pas eux qui vont permettre à la Chine de s'enrichir.


Les Chinois sont incroyablement matérialistes. Ils ont peut-être de bonnes excuses : la vie n'est pas si facile après tout. Ils sont obligés d'économiser toute leur vie pour s'acheter un appartement, les plus nantis ayant le luxe de se payer une voiture en plus. Les Chinois ramènent tout à l'argent. Je crois que Nicolas Sarkozy aurait beaucoup de succès en Chine avec son slogan « travailler plus pour gagner plus » : alors qu'un certain nombre de Français méprisent cette façon de penser, je suis certaine que cette phrase parlerait immédiatement à nos amis chinois !


Dans cette grande équation, quel est mon rôle en tant que prof de français ? Et en ai-je un, d'ailleurs ? Je le crois même si je n'ai pas l'intention de changer leurs pensées mais, plutôt, leur façon de penser. Je veux leur montrer qu'il y a des gens qui perçoivent les choses différemment d'eux; ce qui ne signifie pas que c'est meilleur. Ma seule ambition, c'est de leur forger le début d'un esprit critique, leur montrer la voie, leur ouvrir l'esprit en leur montrant qu'il existe d'autres façons de voir les choses, qu'il n'y a pas de « pensée unique » (décidément tout me ramène à Sarkozy aujourd'hui !). Je ne veux pas le faire de façon brutale : je ne cherche pas à leur imposer quoique ce soit alors j'y vais par petite touche. Et, pour ce faire, j'avoue que les cours d'audiovisuel sont une bénédiction. Je leur ai montré des reportages sur la Birmanie, sur l'Afrique exploitée pour ses richesses naturelles mais dont les retombées ne touchent pas les populations locales (l'Afrique est très à la mode en Chine : beaucoup de mes élèves souhaitent y aller travailler car il y a du travail là-bas et c'est bien payé. Je ne vous fais pas un dessin : vous avez compris pourquoi l'Afrique est importante pour la Chine...),... Sur le thème de la politique, je leur ai passé un extrait des Guignols de l'Info sur Sarkozy et du « Nouvel Immigrant » (parodie de la Nouvelle Star) qui sous-entend que le chef de l'Etat n'est peut-être pas aussi partial à l'égard de tous les étrangers... (je vous conseille de regarder cette vidéo que vous pouvez trouver sur Youtube, elle est géniale !). Je leur distribue également des articles de presse de journaux français qui parlent de problèmes généraux et qui citent la Chine en simple exemple (j'en ai trouvé un récemment qui parlait de l'environnement et qui expliquait que 6 des 30 villes les plus polluées dans le monde se trouvent en Chine)... Je ne fais pas de commentaires sur ce genre d'informations car mon intention n'est pas de critiquer la Chine mais simplement d'amener mes étudiants à prendre du recul et à réfléchir sur leur pays et le monde. Je ne suis guère plus âgée qu'eux mais ils me semblent tellement plus jeunes, peu concernés par le reste du monde et les grands sujets de société. Ils n'ont aucune réflexion; c'est d'ailleurs pourquoi j'ai un peu de mal à faire des débats : ils ont des difficultés à trouver des arguments. Et je sais qu'ici, il ne s'agit pas uniquement d'un problème linguistique...

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4 novembre 2007 7 04 /11 /novembre /2007 16:18

 

Vendredi 2 novembre : sortie scolaire avec l'école primaire de Ning'an Lu, là où je donne des cours d'initiation au français. Un truc a dû m'échapper car la sortie devait originellement nous mener sur une montagne, pas très loin de Qingdao. Or, de montagne, point. Finalement, la sortie s'est transformée en visite "culturelle" d'une fabrique de traitement de germes de soja (en fait, je n'ai pas vraiment su de quoi il en retournait : dans l'usine, on a juste vu les employés nettoyer les germes, après j'ignore si c'était pour les mettre en conserve ou pas... La prof chinoise qui parle anglais n'a pas réussi à m'expliquer...) et d'une autre fabriquant des boissons. Les visites étaient très superficielles et pas très intéressantes (et ce n'est pas seulement parce que je ne comprenais pas !) : on ne visitait pas vraiment les usines. Tout était sur panneaux explicatifs ou petits films documentaires/publicitaires. Mais le point positif, c'est que l'on nous a offert des échantillons à la fin des visites !! Je me retrouve ainsi avec deux sacs de germes de soja (!) et trois petites bouteilles de la marque Dayrich (c'est une boisson lactée, je crois, qui a des vertus pour améliorer la digestion et la santé, en général, paraît-il). Tout cela fut rondement mené car à 14h nous étions de retour à l'école après avoir déjeuné sur le site de l'une des usines.... Je regrette que nous n'ayions pas fait cette excursion à la montagne comme prévu mais la journée fut malgré tout plaisante. Voici quelques photos prises ce jour-là :

PB020108.JPGFabrique de germes de soja















PB020111.JPGDistribution de sachets des germes en question.















PB020114.JPGJeux le midi. Je me suis rendue compte que les jeux des enfants chinois ne différent guère de ceux que j'ai connus dans mon enfance : corde à sauter, élastique, pierre/feuille/ciseaux, diabolos, chercher de petits animaux/insectes puis les écraser.... :) A cet âge-là, ils sont encore innocents : ils échappent encore au téléphone portable que possède tous leurs aînés...









PB020122.JPGVous voyez cette fillette (bon, je sais, j'ai un peu raté ma photo) ? Elle porte des lunettes dont l'un des verres est masqué par une sorte de cache en tissu bleu. Au début, je me suis dit qu'elle avait peut-être eu un accident mais lorsque j'ai croisé une autre fille affublée du même genre d'attirail, j'ai trouvé ça louche. J'ai donc posé la question à ma prof d'anglais préférée. Elle m'a répondu que c'est un moyen pour corriger la vision : l'oeil caché oblige l'oeil plus faible à travailler puisqu'il est le seul qui peut voir. Je ne sais pas si ce genre de méthode corrective existe en France. J'ai tendance à imaginer que non car cela me semble bien chinois, mais je me trompe peut-être !



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16 octobre 2007 2 16 /10 /octobre /2007 20:00

Et pour commencer : une petite photo de votre héroïne préférée !

PA120160.JPG













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Ces photos ont été prises par une des profs-observatrices-élèves qui assistait au cours de vendredi.

Aujourd'hui, j'ai révisé l'alphabet (qu'ils connaissaient assez bien, mises à part quelques confusions avec l'anglais concernant le "e" et le "i" et d'autres avec le pinyin "p" et "b"..). Ensuite, nous avons appris la question "Comment ça s'écrit ?" afin qu'après chacun puisse épeler son prénom. Nous avons terminé sur la notion de "il/elle" (il s'appelle..., elle s'appelle). J'ai commencé le cours en essayant de leur apprendre "Ca va ?" mais, pour cette phrase uniquement, j'ai traduit en anglais car je n'étais vraiment pas sûre qu'ils comprennent la question. C'est incroyable mais cette expression de la vie quotidienne que l'on utilise plusieurs fois dans la journée me semble très difficile à faire comprendre. C'est assez abstrait, en fait. Ca ne se dessine pas et ne se mime pas vraiment non plus. J'aimerais bien savoir si certains ont de bonnes idées sur la façon d'enseigner cette notion dans une langue étrangère sans passer par la traduction ! Si le coeur vous en dit, n'hésitez pas à laisser un commentaire sur ce point !

Aujourd'hui, j'ai également assisté à un cours d'anglais donné par l'une des profs chinoises à des enfants de 6-7 ans. Ils sont plus de 35 dans la classe mais ils sont plutôt obéissants. La prof parlait beaucoup en chinois mais elle traduisait à chaque fois en anglais les consignes des jeux ou exercices. Elle a un don pour créer une atmosphère à la fois ludique et studieuse. Son cours était très vivant et les enfants très actifs. En outre, c'est une école assez moderne puisqu'il y a une télé et un lecteur dvd dans chaque classe et que les profs d'anglais ont des supports audio-visuels en plus des traditionnels livres. J'ai quitté l'école primaire, il y a de cela déjà plusieurs années, mais je suis sûre que les choses ne sont guère différentes maintenant et, alors, la France peut bien prendre exemple sur la Chine (en tout cas, sur cette école !) dans le domaine de l'éducation. Il est vrai que le système éducatif est organisé de façon différente et en Chine, les parents aux revenus modestes doivent se saigner pour payer la scolarité de leur enfant car l'école et l'université sont très chères.

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Avez-vous compris le thème de la leçon ? Il s'agit des chiffres et du pluriel. "Five boys", "how many girls ?"... Le but du jeu c'est de dire combien il y a de filles et de garçons dans chaque rangée.


Et pour terminer sur le sujet de l'école, voici une dernière petite image. 
Ce sont les 10 minutes d'exercices physiques de la matinée : les élèves, bien alignés, suivent une sorte de chorégraphie-danse-sport sur fond musical. C'est très amusant à regarder. Je n'ai pas eu le temps de filmer car la directrice voulant me saluer et savoir comment s'étaient passés les cours la semaine dernière - hiérarchie oblige (je suis en Chine, rappelez-vous) - j'ai dû me rendre dans son bureau.

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Enfin, quelques photos de mon week-end, plus précisément de samedi matin,
où Alexandre (un des étudiants français sur le campus) et A (je ne sais pas trop comment ça s'écrit, c'est un Thaïlandais, ami d'Alexandre, qui étudie également le chinois) m'ont fait découvrir le mont Fushan, juste derrière l'université (en 2 minutes à pieds, on est en bas de la montagne !).


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Jolie vue sur la ville en contre-bas et sur la mer derrière même si tout est enveloppé de brume...

 

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12 octobre 2007 5 12 /10 /octobre /2007 13:17

Non contente de mes 12h de cours à l'université (en comptant au moins le double d'heures de préparation) et de mes 2h de cours par semaine à 3 fillettes françaises pour leur apprendre à lire et à écrire, voilà que depuis mardi, je donne, désormais, également 2h de cours d'initiation au français à des enfants chinois dans une école primaire de Qingdao (je mettrai des photos des bambins prochainement). En fait, j'ai une classe d'une quinzaine d'élèves de 7 à 9 ans.
Ces enfants n'ont jamais entendu un mot de français, il est même possible que je sois la première étrangère qu'ils n'aient jamais rencontrée (les cours d'anglais sont assurés par des professeurs chinoisj). Nous n'avons aucune langue commune : ils parlent à peine anglais et moi toujours pas chinois. Imaginez mon premier cours : comment faire pour communiquer alors qu'ils ignorent comment dire "oui", "non"  ou "je ne comprends pas" et qu'ils ne peuvent pas plus comprendre les consignes  telles que "lisez", "répétez", "parlez plus fort" ou "posez la question à votre voisin".... Alors comment faire ? Par le plus simple : j'ai commencé par répéter plusieurs fois "bonjour" en les saluant un par un. J'ai refait la même chose en leur faisant de signe de répéter la même chose; puis je leur ai montré leur voisin en leur faisant comprendre qu'il fallait dire le mot à leur voisin. Puis j'ai enchaîné sur mon prénom  : "je m'appelle Armel". Je l'ai écrit au tableau en même temps. Je me désignais en même temps pour leur montrer qu'il s'agissait bien de moi. Pour être certaine qu'ils comprennent, j'ai également écrit mon prénom sur une feuille que j'ai mise devant moi. Ensuite, j'ai écrit des prénoms féminins et masculins (petits dessins - très laids - d'une petite fille et d'un petit garçon au tableau) parmi lesquels ils devaient en choisir un. Comme ils ne pouvaient pas les lire, je les ai répété plusieurs fois et chacun son tour, les enfants devaient se lever et me désigner celui qu'ils avaient choisi et qu'ils devaient écrire sur une feuille, comme j'avais fait. Et pour finir, chacun répétait "je m'appelle ... + leur nouveau prénom". Voyant que cela fonctionnait bien, j'ai rajouté la question "Comment tu t'appelles?"Les 3 premiers élèves répétaient ma question mais n'y répondaient pas. Mais à force de répéter en faisant mine de jouer un dialogue, le 4ème élève a compris ce que je faisais et il a répondu à la question. A partir de ce moment-là, les élèves avaient compris et j'ai pu leur faire faire l'exercice par eux-mêmes, l'un posant la question et l'autre y répondant. La première leçon s'est terminée sur un au revoir ! A la fin du cours, je n'avais plus de voix et la gorge complètement sèche mais je me sentais ravie. Mes petits élèves sont charmants, très natures, pas si différents des enfants français si ce n'est qu'ils ont des habitudes dues à l'école chinoise; par exemple, ils se lèvent dès qu'ils 
prennent la parole que ce soit après avoir levé le doigt ou si je les interroge directement. De même, lorsqu'ils se mettent à parler un peu trop fort, il suffit de faire "chut" pour qu'ils se taisent immédiatement. Ah, quel plaisir de se faire obéir facilement, cela me change de mes 3 petites insupportables gamines françaises....

Deuxième cours ce vendredi. Avant de commencer, sourde inquiétude. Quelle va être l'hécatombe ? Combien d'élèves vont revenir en cours ? Qu'auront-ils retenu ? Vous allez me dire que je n'ai pas à m'angoisser excepté que je n'ai pas seulement 15 petits élèves : j'ai également 5 observatrices ! Et oui, n'ayant jamais côtoyer de professeur étranger, les institutrices de l'école sont curieuses de voir mes méthodes. Elles sont très amusantes car je les vois répéter avec application les mots que je prononce tous comme mes petits élèves. Elles ont très envie d'apprendre une autre langue dont elles ignorent tout. Même si je sais que leur observation est tout à fait amicale, j'avoue que ça m'ennuie un peu, surtout qu'elles seront là à tous les cours !!! Le problème, c'est que cela me met un peu mal à l'aise car, moi, je ne suis pas institutrice !!!! Je n'ai jamais travaillé avec des enfants (je n'ai ni Bafa, ni fait de baby-sitting ou ce genre de choses...). Je n'ai même jamais envisagé d'enseigner à des enfants car faire de la discipline ne m'intéresse pas et il me manque le partage que je peux avoir avec des étudiants adultes. Bref, je crains que les institutrices s'attendent à ce que j'aie des méthodes particulières, sauf que je n'ai AUCUNE idée de la façon d'enseigner à des enfants. Ok, il faut que ce soit ludique et il faut varier les activités, mais CONCRETEMENT, je fais comment , moi ????? Quelle idée de m'embarquer là-dedans me direz-vous alors ? Il faut croire que j'ai le goût du risque....

Donc, deuxième cours : je me retrouve avec 17 élèves et 7 profs en observation !!!! (mon cours a lieu sur une partie de la pause de midi, c'est pourquoi beaucoup d'instits sont libres...). Mes petits élèves rentrent dans la classe en me disant "bonjour". Ils le prononcent plutôt bien, cela me réjouit. Je commence à poser la question vue au dernier cours, tous les élèves répondent sans problèmes mis à part deux d'entre eux (que j'avais déjà repérés au premier cours : je vais avoir du mal avec eux, ils n'ont aucune intuition et je ne peux rien faire pour eux s'ils ne devinent pas du tout ce que je leur demande et alors que 10 de leurs camarades ont, pourtant, déjà répondu correctement). J'écris les 3 phrases au tableau car j'enchaîne sur l'alphabet. Frise avec lettres en couleur, faite par mes soins, répétition en coeur puis dans le désordre. Exercice de mise en application : je distribue les lettres sur des feuilles volantes à tous les élèves. Certains se montrent frustrés car ils n'ont qu'une lettre alors que certains en ont deux (évidemment ils ne sont que 17 et il y a 26 lettres dans l'alphabet, malheureusement). Je n'avais pas pensé à cela avant de rencontrer ce petit souci. Ce n'est pas grave, on échangera les lettres de toute façon, par la suite. L'objectif : reconnaissance du son. Lorsque je dis une lettre au hasard, l'enfant qui l'a doit lever la feuille et la montrer à ses camarades. Maitenant, même exercice mais je deviens spectatrice : ce sont les entants eux-mêmes qui doivent prononcer la lettre de leur choix. Pour finir, je distribue l'alphabet et on colorie chaque lettre en la prononçant en même temps. Et enfin, les dernières minutes sont consacrées à épeler quelques prénoms. Mais on continuera cela la semaine prochaine ! Pas plus qu'au premier cours je n'ai utilisé d'autre langue que le français et, néanmoins, nous parvenons à nous comprendre. C'est assez extraordinaire. Vous allez me dire que pour l'instant, ce n'est pas très compliqué. Certes, mais imaginez nos petits français de 7-8 ans avec une prof chinoise qui ne parle pas un mot de français et qui fait tout son cours en chinois ? Par rapport à cette prof imaginaire, j'ai une chance énorme : mes petits élèves apprennent l'anglais, ils connaissent donc les lettres latines; ce qui provoque quelques difficultés d'ailleurs puisqu'ils ont tendance à confondre les prononciations de l'anglais et du pinyin (transcription en lettres latines des caractères chinois) avec celles de l'alphabet français; l'avantage, c'est qu'au moins ils peuvent déchiffrer ce que j'écris au tableau alors que nos petits français seraient bien incapables de lire les caractères chinois ! 

Même si je sais qu'ils ne comprennent rien à ce que je dis, je parle français tout le temps même pour leur donner les consignes. S'ils les comprennent, c'est uniquement par mes gestes et par les exemples que je donne, mais je me dis qu'à force de répéter toujours plus ou moins les mêmes choses, certains élèves feront peut-être un jour le lien entre mes gestes et mes mots. Je suis, en effet, surprise de constater à quel point certains sont incroyablement dégourdis et intuitifs : je jurerais qu'ils ont déjà appris le français tellment ils captent presqu'immédiatement la consigne. Evidemment, comme je l'ai écrit précédemment, certains ne montrent malheureusement pas ces aptitudes. Mais, ce n'est pas grave parce qu'ils sont tous tellement mignons ! je craque complètement lorsque je vois leur petite bouille levée vers moi  ! Ils se montrent vraiment très motivés; c'est vraiment extra.

En sortant du cours, cet après-midi, j'étais heureuse. C'était un instant parfait, vous savez ce genre de moments éphémères, si rares ,où l'on se sent parfaitement serein et à notre place : j'étais là où je devais être, à faire ce que j'aime et à le faire bien, j'espère. Avec mon coeur, en tout cas. Bref, c'est après avoir vécu ces instants de bonheur que je me dis que le métier de professeur est l'un des plus beaux du monde !!

Vous aurez compris une chose, je n'ai qu'une hâte, retrouver mes chers petits élèves mardi prochain. Cette journée sera certainement intéressante puisque j'irai également observer une classe d'anglais donnée par une de mes observatrices.

En tout cas, il paraît que je suis très jolie (allez en Chine, rien de mieux pour flatter votre ego !), que je suis élégante et que lorsque je parle français, j'ai une très jolie voix, toute douce et que dans ma bouche, le français semble être une musique.... Désolée, je ne me lance pas de fleurs, je répète simplement  ce que m'a dit l'une des institutrices en anglais. A vous de décider ce qui relève de la politesse ou non.... 

Enfin, une petite anecdote. Lorsque j'ai pris le bus pour me rendre à l'école, j'ai vu à l'intérieur un petit panneau en chinois ,sous-titré en anglais : "Please speak mandarin chinese". J'étais soufflée : franchement, me suis-je dit, ils exagèrent ! Ce n'est pas de notre faute si nous ne parlons pas tous chinois, ils n'ont qu'à faire un effort eux-aussi pour parler un peu anglais. J'ai donc fait part de ma surprise à l'une des institutrices qui m'a expliqué que j'avais mal interprété les choses. On peut lire cette phrase dans les bus où il y a un préposé dans le bus qui vous délivre le billet, or cette phrase indique aux Chinois qu'ils ne doivent pas utiliser leur dialecte car l'employé ne le comprendrait peut-être pas. Ah !!! je comprends mieux ! J'aime beaucoup relever ce genre de petits détails qui illustrent les particularités d'une culture. Les langues régionales - les dialectes - en Chine sont tellement importantes et différentes; ce que souligne cette petite phrase dans le bus.

 Puisque j'évoque le sujet de l'interculturalité, cela me rappelle une blague faite par un de mes élèves en 2ème année qui ne m'a pas du tout fait rire. Il racontait une histoire qui se passait au zoo et il a finit par une chute qu'il voulait originale, je crois, en disant qu' "un Français en voyant un singe s'est mis à vomir parce qu'il le trouvait laid et que lorsqu'un Chinois a vu un Japonais, il s'est mit également à vomir car il le trouvait laid" (ou que le Japonais était comme le singe, laid, - je n'ai pas tout bien compris mais cela revenait au même). Tous les élèves se sont mis à rire. Pourquoi interculturalité ? parce que cette anecdote montre les sentiments de certains Chinois à l'égard des Japonais. Je me souviens d'ailleurs avoir lu sur leur fiche de présentation que certains détestaient les Japonais ou qu'ils n'avaient pas oublié le passée. En même temps, j'en connais d'autres qui aiment la culture japonaise (la musique ou les manga). En tout cas, les sentiments à l'égard du Japon et des Japonais sont assez exacerbés, comme on le voit... En France, on imagine pas de jeunes Français de 20 ans dirent qu'ils détestent les Allemands. Mais le contexte est différent: avec l'Europe, les programmes d'échanges linguistiques, Erasmus...et l'Allemagne qui a fait son mea-culpa, contrairement au Japon, la donne n'est pas la même et les conséquences n'ont plus, au final.
C'est incroyable comme de petites phrases anodines peuvent être révélatrices. Par exemple, sur l'une des copies, j'ai vu que l'élève qui racontait un fait divers sur un voleur qui avait fait un casse dans une banque a terminé l'histoire en écrivant  que "il a été condamné à mort évidemment"; ce qui ne serait pas forcément si évident pour un Français....  Oui, je suis bien en Chine même si j'ai parfois tendance à l'oublier !

Pour finir sur des pensées plus positives, replongeons-nous dans les vacances le temps de quelques photos....


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Sur l'une des plages de Qingdao, du vélo sur l'eau avec une amie chinoise qui découvrait Qingdao et la plage !

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Quelques images de la vieille ville de Qingdao et de ses bâtiments d'architecture occidentale lorsque la ville était encore une colonie allemande.

PA040089.JPG Eglise catholique St Michel (1934)

PA040076.JPGAncien bâtiment officiel des Gouverneurs Allemands.(1904-1906)

PA040109.JPG Ancienne résidence du Gouverneur Général Allemand (1905)

 

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15 septembre 2007 6 15 /09 /septembre /2007 18:36

Voici ma première semaine de cours terminée. Elle s'est bien passée : j'ai l'impression d'avoir fait ça toute ma vie. Il faut préciser que travailler avec des étudiants chinois est toujours un plaisir : gentils, respecteux, serviables, studieux... N'est-ce pas ce que tout professeur espère de ses élèves ? Et cette timidité dont on les accuse si souvent ? Certes, ils sont peut-être plus introvertis que les étudiants en France mais, encore une fois, il ne faut pas généraliser. Mes étudiants de 2ème année sont, paradoxalement, plus actifs et participent beaucoup plus que mes étudiants de 4ème année qui ont pourtant un meilleur niveau. A quoi cela est-il dû ? Je ne sais trop : je crois que cela est lié au contenu du cours car avec les 4ème année, je travaille beaucoup plus la compréhension et l'expression écrite. 
Et si je commençais dans l'ordre ? J'enseigne 12h par semaine, 6h aux étudiants de 4ème année et 6h à ceux de 2ème année. Les effectifs sont petits, seulement une vingtaine d'élèves dans chaque niveau; ce qui est également le rêve pour un professeur (surtout lorsque je compare ma situation avec celle de certains professeurs américains que j'ai rencontrés qui ont des classes de 30, 60, voire de 100 étudiants !). Mais ce petit nombre d'étudiants est la preuve que le département français de l'université de Qingdao n'est pas forcément très prisé. En réalité, j'ai fait un petit sondage auprès de mes étudiants dont certains ont avoué qu'ils avaient pris le français par défaut car ils n'avaient pas pu entrer dans l'université ou le département qu'ils souhaitaient, par exemple. Seules 3 de mes étudiants sont venus en France (à l'université Rennes 2) dans le cadre d'un échange entre les deux villes et peu d'entre eux souhaitent réellement travailler en France ou trouver un travail en rapport avec la France ou le français. En fait, presqu'aucun n'a réellement envisagé le métier qu'il voudrait faire après ses études. Ainsi, s'ils ne sont pas tous mus par l'amour du français, ils travaillent sérieusement car leur motivation est commune à tous les étudiants du monde : le désir de réussir ses études (et de réussir le concours leur permettant de faire un master). 
En ce qui concerne le corps professoral, nous ne sommes que des professeures (5 ou 6, je ne les connais pas toutes encore). Il semble que l'organisation à l'université soit assez .... floue. (restons vague, on ne sait jamais qui pourrait tomber sur mon blog .... ). Par exemple, la directrice du département était incapable de me dire mon emploi du temps : j'ai dû l'attendre jusqu'au dimanche après-midi sachant que je commençais les cours le lendemain et alors même que nous étions convoqués le dimanche matin à 9h pour le recevoir. En fait, elle ne connaissaît pas nos emplois du temps qui n'étaient disponibles que sur le site internet de l'université et le serveur avait un problème ce jour-là.... Il n'y a aucune réunion pédagogique, pas de concertations entre les programmes et les contenus de cours des professeurs.... Sur mon emploi du temps, on m'a donné des intitulés de cours sans que personne ne puisse me préciser quel devait être, sinon le contenu, au moins les objectifs ou les grandes lignes de ce que je devais enseigner dans ces matières. Sans manuel, sans consignes, sans connaître le niveau des élèves et celui qu'ils devraient atteindre en fin d'année, comment savoir que faire dans mes cours ? Cette première semaine a donc été celle de la mise au point.
D'autre part, étant la seule d'origine française, c'est à moi qu'il est incombé de prendre en charge les cours qui exigent une parfaite maîtrise de la langue (cours sur la presse, de civilisation, d'audiovisuel et de français général pour les 4ème année). Lorsque j'ai demandé si l'on pouvait m'en dire un peu plus sur ce que j'étais censée enseigner dans ces matières, on m'a fait comprendre que ces cours étaient l'apanage du professeur français et qu'ils étaient donc incapables de me répondre car chacun les menait à son gré. Voilà qui est très pédagogique. Comment savoir si ce que je vais faire cette année n'a pas été déjà étudié en classe les années passées ? 
Néanmoins, j'adore mon métier et, avec mes stages et cette première expérience, je me dis que les difficultés que peut rencontrer un professeur est moins lié aux élèves qu'au cadre institutionnel....
Pour finir sur ce sujet, je vous répéterai juste quelques clichés sur la France que mes étudiants de 2ème année m'ont donnés lorsque je leur ai demandé ce qu'ils pensaient de la France ou des Français. Pour eux, la France se résume à Paris et à ses monuments (dont ils peuvent citer tous les noms !), à la mode, à la gastronomie (fromage, foie gras, vin....) et les Français à Zidane, Sophie Marceau (quelqu'un peut-il me dire pourquoi est-ce la seule actrice française connue en Chine ? Ce n'est pas la première fois que des Chinois me citent son nom...), Charlemagne (!), Napoléon.... Et, évidemment, le français est une très belle langue et les Français sont beaux et romantiques !

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