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28 octobre 2008 2 28 /10 /octobre /2008 12:57
Je préviens à l'avance : cet article n'est pas intéressant car il s'agit juste d'un coup de gueule personnel. Mais il faut bien que je me défoule et je ne connais pas meilleur moyen que l'écrit. Donc, vous pouvez passer votre chemin car vous pourrez trouver plus captivant ailleurs.

La semaine dernière, l'école primaire où j'enseigne m'a prévenue qu'une prof française de chinois viendrait à l'école aujourd'hui. Soit, comme le Shandong est jumelé avec la Bretagne et les Pays de la Loire, différents échanges sont organisés et je savais que la région était à l'origine de ce projet. Mais en réalité, je me suis retrouvée dans l'oeil du cyclone sans trop savoir comment.

Tout d'abord, la prof en question n'était pas une simple prof; comme d'habitude, j'étais la dernière informée et tout le monde a semblé considérer que je savais qui elle était et ce qu'elle faisait là; sauf que ...non. Bref, je n'ai même pas réussi à bien comprendre sa fonction réelle (la plupart de la réunion s'est passée en chinois puisqu'elle maîtrise parfaitement la langue); ce qui est certain, c'est qu'elle supervise l'enseignement du chinois en Bretagne, une sorte de prof-inspectrice-chef. Je l'ai prise en grippe aussitôt l'avoir vue : elle a cet air pincé et revêche des profs irascibles qui vous regardent comme si vous étiez un cas désespéré. Sincèrement, lorsqu'elle m'a saluée, j'ai eu l'impression d'avoir 10 ans, que j'étais de retour sur les bancs de l'école et que j'avais fait une grosse bêtise. En outre, elle m'a tout de suite tutoyée (je sais que je fais plus jeune que mon âge et je n'ai rien contre le "tu" en général), mais là, cela n'a fait qu'amplifier mon sentiment d'infériorité. La journée s'annonçait difficile.

Pendant la réunion, la directrice a présenté l'école, ses projets, ses ambitions, etc; et la Française a parlé de son parcours et des plans de la Bretagne en ce qui concerne l'enseignement du chinois. Elle a notamment cité l'exemple d'une école primaire de la Poterie qui va mettre en place des cours de chinois à partir du CE2 (à raison de 3/4 d'h par jour); enseignement qui se poursuivra au collège (6h/semaine) puis au lycée (8h/semaine), je crois. Pour l'école primaire, 7 autres écoles en France ont mis en place ces classes internationales de chinois. Les deux femmes et les représentants de l'organisme qui s'occupent des relations entre les deux régions ont discuté de possibles échanges futurs entre les deux écoles.

Mais cela ne se fera pas tout de suite car dans l'école où j'enseigne, le français n'est qu'anecdotique : les cours s'ajoutent à tous les autres ce qui décourage un certain nombre d'enfants qui ont déjà beaucoup de classes et de devoirs. En plus, je suis la seule prof étrangère dans la seule école primaire de la ville qui propose des cours de français. Ceux-ci ne reçoivent donc aucun soutien quelconque : il n'y a aucun programme, aucune concertation, aucun but à long terme (aucun collège ou lycée à Qingdao n'offre des cours de français). Evidemment, la conversation s'est donc orientée sur mes cours et là, je me suis sentie vraiment mal car lorsque j'ai présenté ce que j'avais fait et la façon dont je travaillais, elle n'a pas cessé de me fixer de son air supérieur en me coupant toutes les 2 minutes "Tu ne devrais pas dire ça.", "Tu n'aurais pas dû faire ça.", "Ah, tu n'a pas fait ça ?"....


Je sais que les critiques sont formatives; que cette femme est très compétente et que son expérience dans l'enseignement pourrait m'être précieuse, mais à cet instant, je n'avais qu'une envie : que le plafond s'effondre sur elle ou qu'elle s'étouffe en buvant son thé. J'aurais pu accepter ses remarques si elle me connaissait, si elle avait vu mes cours, mais là, elle a jugé de tout sans rien connaître. C'est vrai que j'ai souvent des doutes lorsque j'enseigne aux enfants parce que je n'ai pas l'habitude : je n'ai jamais assisté à aucun cours de fle pour enfants; d'autre part, je dois tenir compte du fait qu'on se voit très peu par semaine, qu'ils ne révisent pas chez eux; quela directrice insiste sur le côté ludique; que je suis isolée; que cet apprentissage est hors de tout cadre, ....
J'ai donc été obligée, je suis obligée de me former sur le tas, toute seule, sans matériel pédagogique (à part les livres fournis par l'ambassade); alors, lorsqu'elle m'a dit "Vous ne suivez pas le manuel, j'espère.", j'avais envie de lui dire : "Vous croyez que je ne sais pas qu'aucun manuel n'est parfait ? Et vous voulez donc que je pioche des activités à droite à gauche dans d'autres manuels ? Mais bien sûr ! Quelle bonne idée ! Je n'y aurais pas pensé toute seule ! Et je les trouve où les autres supports pédagogiques ? C'est déjà pas si mal d'avoir un livre aussi imparfait soit-il." Qu'est-ce qu'elle croit qu'il y a des médiathèques avec des livres et autres ressources en français pour enfants à chaque coin de rue à Qingdao ?


Evidemment, je ne me contente pas du manuel et je rajoute plein de jeux pour apprendre et pratiquer le vocabulaire, notamment; je crée aussi des power points, j'essaie de trouver des vidéos sur internet, mais c'est vraiment galère. En outre, je n'ai même pas une vraie classe où je pourrais créer et accrocher des affiches; bref, il ne s'agit pas d'un "vrai" cours. Cela n'a rien d'officiel; c'est donc très différent du projet d'ouverture de la classe de chinois en CE2 à Rennes pour lequel elle a oeuvré et qui est soutenu par le ministère, la région,...

J'admets que ses critiques m'ont vexée mais si je ne suis peut-être pas une bonne prof, je fais de mon mieux, j'y mets du coeur et de la volonté avec les moyens à ma disposition; et sincèrement, je pense que ma situation n'est pas comparable avec les profs français en France. Alors, j'aurais voulu qu'elle se mette un peu à ma place et qu'elle nuance ses paroles car si elle parle bien chinois, je doute qu'elle ait jamais enseigné en Chine et je ne suis pas sûre qu'elle mesure la pauvreté des ressources et de la formation des profs de fle.

Heureusement, la directrice a spontanément fait mon éloge en répétant à quel point les élèves m'appréciaient et combien elle-même était ravie de mon travail. Politesse, me direz-vous, mais elle l'a fait avec une chaleur particulière qui, de fait, m'a consolée car, après tout, peu m'importe ce que pense cette "Madame-je-sais-tout-mieux-que-tout-le-monde", donneuse de leçons, du moment que les personnes pour lesquelles je travaille apprécient mon travail, rien d'autre ne compte !

La matinée s'est terminée en beauté, si je puis dire, car malheureusement j'avais cours ou plutôt j'avais cours et, malheureusement, elle voulait l'observer ! Je ne sais pas si je saurai jamais ce qu'elle en a pensé car elle est partie avant la fin pour une autre réunion ailleurs. En réalité, j'étais soulagée de ne pas pouvoir lui dire au revoir car j'avais suffisamment entendu de paroles déplaisantes pour me gâcher toute ma journée si ce n'est toute ma semaine.

Enfin, la cerise sur le gâteau, c'était ce soir en rentrant chez moi après un autre cours dans une autre école primaire avec mes petites Françaises. Devant mon immeuble, j'ai croisé la prof du département espagnol. Elle parle un français parfait (elle a fait toute sa scolarité dans une école française en Espagne) mais j'ai rarement connu une personne aussi antipathique. J'essaie de l'éviter la plupart du temps car elle ne cesse de se plaindre de sa situation : elle répète inlassablement qu'elle a enseigné dans les meilleures universités chinoises; qu'elle est une excellente chercheuse, etc... et qu'ici, c'est horrible : qu'elle ne peut pas vivre décemment avec un si petit salaire; qu'à Canton, elle gagnait plus de 9000 yuans par mois,  qu'elle a trop d'heures d'enseignement, que ce qui l'intéresse c'est la recherche pas de donner 12h de cours par semaine, que les 1ère année sont nuls, les secrétaires désagréables, la nourriture infecte, que tout est trop épicé, qu'elle refuse de manger à la cantine car l'odeur lui soulève le coeur, qu'elle n'a qu'une hâte, c'est de quitter cet endroit, qu'elle est persécutée car si elle a dû quitter les précédentes universités c'est parce que ses collègues étaient jaloux d'elle,....
A chaque fois que je la croise, je dois subir une litanie sans fin de récriminations acerbes. Je suis certaine qu'elle est très compétente dans le domaine linguistique (elle parle à la perfection au moins 3 langues et en maîtrise 2 autres très bien) et peut-être dans l'enseignement, mais si elle se montre tout le temps aussi acrimonieuse, pas étonnant que les universités ne la gardent pas plus d'un an.

En tout cas, elle alimente un certain nombre de conversations car mes 2ème année m'ont rapporté que leurs camarades du département espagnol se trouvent fort malheureux avec cette prof qu'ils ont surnommé "la sorcière", tant en raison de son apparence que de son caractère. C'est dire !... En fait, je ne suis pas loin de penser la même chose qu'eux...
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commentaires

A
Ah! Les profs français recrutés par concours en France! Ils ont tout fait et ils savent tout, puisqu'ils ont réussi ce fameux concours. Ils n'ont plus rien à apprendre, mais tout à critiquer. Ils ont le savoir suprême. Ça fait belle lurette que je ne suis plus impressionnée quand je leur dis que je suis prof de FLE car heureusement pour moi j'ai aussi d'autres diplômes, obtenus dans une université étrangère anglophone et ça, ça leur cloue le bec automatiquement quand je sens venir le petite phrase assassine. Et là je ne les lâche plus, alors qu'habituellement je ne suis pas du genre à me vanter, mais ils pour moi ils l'ont cherché. Vous êtes prof de FLE en Chine, vous avez des compétences et des expériences qu'ils ne pourront jamais avoir avoir même dans leurs rêves les plus fous, et c'est ça qui les dérange plus que tout. Quand on est bien dans ses
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A
...baskets, je ne vois pas quel besoin on a de rabaisser quelqu'un / faire montre de son mépris. Et personnellement, je connais très peu (euphémisme) d'enseignant en France qui travaille en roue libre sans matériel pédagogique, ni bouquin. Surtout dans le 1er degré. Et retravailler ( même presque entièrement) du matériel téléchargé sur Internet ne compte pas non plus, j'aime le leur rappeler, c'est la même chose, l'idée ne leur est pas venue en dormant, hein... Je vous souhaite bon courage pour la prochaine fois où vous aurez à croiser un autre de ces phénomènes... Vous êtes aussi capable qu'eux.
A
Pas content, pas content!!!<br />
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